Concerts au musée
Les
musées du monde entier s’interrogent sur leur relation avec le
public. Pour rester attrayants dans le monde actuel, ils abattent
leurs murs et ouvrent leurs portes à d’autres groupes cibles et
formes d’art. Une entreprise dans laquelle s’illustre tout
particulièrement le musée royal des Beaux-Arts d’Anvers.
Depuis
2011, le musée royal des Beaux-Arts d’Anvers est fermé pour
transformations et agrandissements. Le musée abat ses murs, au sens
propre comme figuré. Il en va d’une nécessité, dès lors qu’on
sait que 89 % de la population ne met aujourd’hui jamais les
pieds dans un musée des beaux-arts. «Nous devons réduire
drastiquement ce pourcentage», estime Joanna Smits, chargée
d’activités destinées au public pour le musée. «Le monde évolue
en permanence, et avec lui les besoins des visiteurs. Nous devons
donc nous développer dans le même sens.»
Les
visiteurs critiques sur «Instagram»
Un
facteur important dont les musées doivent tenir compte est le fait
que le visiteur moyen a souvent plus de quarante ans. Ce groupe
souhaite avant tout acquérir des connaissances. Les musées
cherchent maintenant des points de rencontre avec d’autres tranches
d’âge ayant d’autres désirs, explique Joanna Smits.
«Les
jeunes générations, y compris les enfants et les familles,
envisagent une visite de musée davantage comme une activité
sociale, qui doit être à la fois divertissante et instructive. Le
musée royal des Beaux-Arts d’Anvers, en l’occurrence, possède
une remarquable collection d’art chrétien et occidental, alors que
les jeunes générations sont de plus en plus bigarrées sur le plan
ethnique. À nous de réussir à rencontrer leur univers.»
Les
musées d’art sont aujourd’hui concurrencés par un éventail de
loisirs de plus en plus vaste. Difficile, dans ce contexte, de
retenir l’attention des visiteurs potentiels. Par ailleurs, les
visiteurs se montrent plus critiques, rapporte Nathalie Pauwels,
chargée de relations presse et de marketing. «De plus en plus
souvent, le public décide ou non de visiter un musée sur la base
d’avis et de photos publiés sur TripAdvisor
ou Instagram,
c’est-à-dire sur la base des expériences d’autres personnes. Il
faut que tout soit à leur convenance: de l’accueil à la visite en
passant par le magasin et le restaurant. Le musée doit faire
comprendre en un coup d’œil que chacun y trouvera son compte.»
Le
nouveau musée
Le
musée royal des Beaux-Arts d’Anvers ne s’est pas croisé les
bras et travaille à des solutions. Pour maintenir sa visibilité, il
expose des œuvres en déplacement et expérimente de nouvelles
manières de toucher le public. Les expositions sont en outre conçues
par une équipe diversifiée comprenant des collaborateurs chargés
de faire primer le lien avec les visiteurs. Le musée royal des
Beaux-Arts d’Anvers garde également un œil sur d’autres musées
qui s’emploient à adapter leur approche.
Le monde évolue en permanence, et avec lui les besoins des visiteurs.
Mais
le musée royal des Beaux-Arts d’Anvers va plus loin. En sa qualité
de «nouveau musée», il veut «émerveiller», «relier». La
collection sera désormais présentée selon un agencement
thématique, et non plus chronologique, «pour que le visiteur n’ait
pas l’impression d’un long cours d’esthétique ou d’histoire
de l’art». Le musée opte pour des thèmes actuels qui entrent en
résonance avec la présentation de la collection et les expositions
temporaires. Il veut ainsi éveiller la réflexion et encourager des
discussions intéressantes. «Lors de nos visites guidées, nous
misons sur le dialogue, notamment par ce qu’on appelle le slow
art,
qui consiste à se réunir devant une œuvre en petit groupe pendant
une heure, avec un guide comme modérateur», décrit Ine Vermeylen,
chargée d’activités à destination du public au musée royal des
Beaux-Arts d’Anvers. Lors des ateliers du musée, les visiteurs se
saisissent de la collection de façon créative.
«Artists
in Residence»
Le
musée royal des Beaux-Arts d’Anvers mélange aussi les genres dans
le cadre du projet Artists
in Residence
(AiR). Un groupe disparate de vingt artistes de scène s’inspirera
du musée et de ses collections, de ses expositions, de son
fonctionnement et de son site pour créer de nouvelles productions:
concerts, compositions musicales, pièces de théâtre ou encore
performances de danse.
En
retour, le musée se laissera stimuler par ces artistes. Christine
Van Mulders, responsable du projet AiR, explique: «Le musée
lui-même s’inspirera des nouvelles créations pour se renouveler
et se développer continuellement. À la réouverture du musée royal
des Beaux-Arts d’Anvers, certaines productions du projet AiR seront
intégrées dans les activités destinées au public sous la forme de
visites guidées, d’audio-tours, de poésie en salle et
d’ateliers.»
Le
projet Artists
in Residence,
qui court provisoirement jusqu’en 2021, doit donner lieu à une
véritable «fertilisation croisée» permettant non seulement aux
artistes et au musée, mais aussi aux entourages et aux différents
groupes cibles, d’apprendre les uns des autres. «Ainsi, nous
pourrons concevoir un programme diversifié et intégré, afin que
chaque visiteur potentiel du musée, mais aussi chaque passant,
ressente la chaleur d’une maison ouverte et découvre la dynamique
d’un lieu dédié à l’expression artistique. Cette approche
réaffirme le caractère interdisciplinaire et accessible du grand
temple des arts et carrefour de créativité que veut être le musée
royal des Beaux-Arts d’Anvers dans le quartier Zuid», conclut Van
Mulders.