Les élections de 2024 s’annoncent cruciales pour l’avenir du pays. Le cordon sanitaire va-t-il résister? Quelles sont les priorités des partis flamands? Quels enjeux animent les citoyens au nord du pays? À travers leur périple de 300 kilomètres à vélo, le journaliste Aubry Touriel et le photographe Jef Van den Bossche tentent de trouver réponses à ces questions. En Flandre-Occidentale, des citoyens se prononcent sur la fin du vote obligatoire.
Les Flamands ne
seront plus obligés d’aller voter lors des élections communales et
provinciales en octobre. En parallèle, les jeunes entre 16 et 18 ans vont
devoir quant à eux aller voter lors des élections européennes en juin. Les
citoyens du nord du pays sont-ils au courant de ces changements fondamentaux dans
le fonctionnement de la démocratie? Qu’est-ce qu’ils en pensent ?
© Jef Van den Bossche
«Vlaams Belang, Vlaams Belang… il ferait mieux de créer un Belgisch Belang!»
Dans le parc en face de la gare de
Courtrai, Jean-Claude, 79 ans, artiste, promène son chien. Malgré son
désintérêt pour la politique, il compte bien se rendre aux urnes en juin. «Je
ne m’intéresse pas à la politique, mais cette année, je vais voter. C’est
important d’aller exprimer sa voix.»
Jean-Claude critique également le système politique actuel: «Il y a trop de ministres, de députés et de parlements.» Même s’il adopte un discours très proche des idées du Vlaams Belang en matière d’immigration, Jean-Claude ne veut pas d’une Flandre indépendante: «Retournons à une Belgique unie. Nous sommes déjà un si petit pays… Vlaams Belang, Vlaams Belang… il ferait mieux de créer un Belgisch Belang!»
© Jef Van den Bossche
À Roulers, Diante, 16 ans, profite
du soleil avec son amie dans un parc. Cette année, elle va devoir voter pour la
première fois aux élections européennes.
Au départ, le gouvernement fédéral souhaitait rendre le vote facultatif pour les européennes, mais la Cour constitutionnelle a rendu un avis en mars: les jeunes sont obligés aussi d’aller voter, comme les adultes, pas de discrimination.
© Jef Van den Bossche
Visiblement, peu de jeunes Flamands semblent savoir qu’ils doivent aller se rendre aux urnes pour les élections européennes. Comme les autres trois étudiants interviewés lors de cet épisode, Diante croyait qu’elle n’était pas obligée de voter: «C’est bien qu’ils nous donnent le choix. On a le choix, non?… Ce serait utile que l’école nous informe plus. Les jeunes ne se préoccupent pas beaucoup de la politique.»
© Jef Van den Bossche
Fin du vote obligatoire, quel impact?
Le gouvernement flamand a décidé
sous cette législature de supprimer l’obligation de vote pour les élections
communales et provinciales. Cette initiative vient des libéraux flamands et de
la N-VA et a obtenu le soutien du CD&V. Pour les élections fédérales, le
vote reste obligatoire en théorie. Dans la pratique, en 2019, les
abstentionnistes étaient le premier «parti» du pays, représentant 17 % des
électeurs.
© Jef Van den Bossche
La KULeuven a sorti une étude qui analyse le comportement des électeurs en 2019. On y posait la question suivante: «si le vote pour le Parlement n’était plus obligatoire en Belgique, iriez-vous voter toujours, la plupart du temps, parfois ou jamais?»
Résultat: la moitié des Flamands participerait toujours aux élections, tandis que plus d’un électeur sur cinq renoncerait définitivement à son droit de vote. Et les différences entre partis sont frappantes: les électeurs de Groen seraient ceux qui continueraient le plus à aller voter: 74%. À l’inverse, un tiers des électeurs du Vlaams Belang n’iraient plus jamais voter si l’obligation de vote était supprimée.
© Jef Van den Bossche
Cependant, cette étude est basée sur un questionnaire fédéral, et non communal. Il est donc difficile de prédire l’impact réel de la suppression de l’obligation de vote pour les élections locales, conclut Dave Sinardet: «Des études internationales montrent que les gens qui ne vont pas voter quand il n’y a pas d’obligation, sont généralement moins éduqués, ont un revenu moins élevé. Dans les grandes villes, moins de citoyens d’origine immigrée iraient voter. Mais cela reste assez imprévisible.»
© Jef Van den Bossche