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arts, pays-bas français

À Gravelines, l’estampe en majesté

23 avril 2025 4 min. temps de lecture Passage

À Gravelines, le musée du Dessin et de l’Estampe originale constitue une proposition plus qu’originale sur la partie frontalière. Une étape indispensable pour notre série «Passage».

C’est un espace hors du temps. La faute, ou plutôt, grâce aux fortifications édifiées à partir de Charles Quint et à ces hauts talus de verdure qui ceinturent toujours le site de l’Arsenal de l’agréable cité de Gravelines. Après avoir passé la porte, on se sent comme coupé de la ville qui nous entoure. Au cœur de jardins à la française, qui invitent à la promenade entre les statues, plusieurs bâtiments datant du XVIe au XVIIIe siècles témoignent encore de la vocation militaire des lieux: l’ancien corps de garde qui abritait les soldats, la poudrière pour les réserves d’artillerie, des casemates…

Un cadre idoine pour un musée particulier, le musée du Dessin et de l’Estampe originale. Original, le musée l’est réellement. En dehors de cabinets d’arts graphiques, il n’existe pas vraiment d’établissement consacré à l’estampe, cette technique d’impression, via une presse, d’une œuvre préalablement gravée, encrée et réalisée sur un support de bois, de cuivre oui de pierre. 88% des œuvres du musée sont des estampes… «D’ailleurs, nous envisageons de changer notre nom pour l’axer uniquement sur le musée de l’estampe», précise Virginie Caudron, directrice des lieux.

Ce musée est né en 1982 sur l’impulsion du groupe de Gravelines, des artistes habitués à organiser des expositions collectives dans la cité. Présidé successivement par le peintre Arthur Van Hecke, puis par le sculpteur Charles Gadenne, ce groupe avait pour ambition de faire connaître l’art de son époque. Pour «lever des fonds, il avait proposé aux artistes de réaliser une matrice cuivre ou pierre lithographique pour l’association, qui se chargerait d’imprimer les épreuves». Une manière de mieux diffuser les œuvres, qui faisait naitre par ricochet cette orientation vers l’estampe, même si l’établissement d’origine devait être consacré aux arts graphiques en général.

28 000 œuvres sans cesse en mouvement

Aujourd’hui, Gravelines regroupe environ 28 000 œuvres! «Nous fonctionnons beaucoup par dons, explicite la directrice. Ils sont facilités par le fait que l’estampe est un art fait pour être partagé, plus accessible.» Parmi les noms qui résonneront aux oreilles du grand public, on y retrouve des œuvres de Goya, Durer, Picasso, Hokusai, mais vous ne les verrez pas forcément lors de votre venue. En raison de la fragilité de ce type de réalisations vis-à-vis de la lumière, l’accrochage change tous les six mois! C’est donc une exposition (im)permanente que propose de découvrir ce musée unique où Félix Vallotton côtoie également Claude Mellan ou Stanley William Hayter.

Des expositions temporaires complètent le parcours (im)permanent. Jusqu’en mai, celle consacrée à Judith Rothchild vaut le coup d’œil. Ses «Lumières noires» proposent de saisissantes natures mortes, mais aussi des paysages ou scènes à la Hopper. La seconde exposition temporaire, autour de Jean-Pierre Velly, interroge sur les accumulations liées à la croissance. Plus de deux cents œuvres sont ainsi exposées en permanence.

Forcément, avec ce changement d’accrochage deux fois par an, la logistique est particulière pour ce musée aux 11 000 visiteurs. Des curieux qu’il faut aussi guider sur les pas de l’estampe, un art et une technique relativement mal connus. Une attention particulière est ainsi mise sur la méthode, avec des exemples de presses, mais aussi des explications sur la manière de faire. «L’estampe est souvent associée au Japon, il faut expliquer que c’est bien plus large que cela». Des ateliers –à réserver au préalable– permettent aussi de s’initier à l’art de la gravure.

Développer les relations transfrontalières

Internationale par nature, l’estampe trouve ainsi parfaitement son cadre à Gravelines, marquée par la frontière. Longtemps la dernière ville des Pays-Bas espagnols, elle voit aujourd’hui, comme le reste du littoral nordiste, le ballet des exilés qui veulent rejoindre l’Angleterre de l’autre côté de la mer du Nord. L’art, lui, circule bien plus librement, Virginie Caudron, depuis son arrivée à la tête de l’établissement en 2017, s’est donné comme axe de développer les relations avec la Belgique et les Pays-Bas. 

«Nous avons 7% de Belges, je remarque que ce sont souvent des visiteurs plus friands d’art graphiques. J’ai organisé plusieurs expositions d’artistes belges: Jan Van der Straet en 2017, Frank Masereel et Olivier Deprez en 2018, Charley Case en 2019… je m’apprête à faire une exposition sur les intimistes, avec une recherche des relations entre graveurs français et belges au XIXe siècle. C’est donc bien volontiers que nous essayons de créer des relations avec la Belgique». Une raison de plus pour aller découvrir ce musée charmant, au sein d’une ville qui ne manque pas d’autres atouts, entre son patrimoine historique et son vaisseau de Louis XIV grandeur nature en construction.

Site web du musée

Montard

Nicolas Montard

Journaliste free-lance et cofondateur du magazine en ligne DailyNord.

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