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L’Institut Rega à Louvain et la lutte contre le Covid-19

Par Dirk Van Assche, traduit par Chloé Bracaval
27 mars 2020 4 min. temps de lecture

En quête d’un remède contre le coronavirus, 15 000 molécules médicinales sont envoyées, aux frais de la Fondation Bill et Melinda Gates, pour examen à l’Institut Rega à Louvain. Il paraîtrait que nul autre institut ne peut mener la recherche plus rapidement et de manière plus sûre que celui-là.

La Fondation Gates espère que parmi ces échantillons de molécules figurent celles susceptibles de combattre le nouveau coronavirus. Il n’est pas surprenant qu’elle ait fait appel à l’Institut Rega: celui-ci dispose probablement du seul laboratoire au monde capable de réaliser de tels tests aussi rapidement et de manière très sûre. Depuis 2017, le nouveau bâtiment de l’institut abrite un laboratoire entièrement automatisé et pouvant fonctionner 24 heures sur 24.

Les échantillons examinés contenant des molécules renfermant, elles, des antivirus proviennent de l’institut de recherche Scripps situé en Californie. À leur arrivée à Louvain, on ajoute à ces molécules des cellules du virus COVID-19. On espère ensuite que l’une de ces molécules sera en mesure de ralentir l’action du virus. On ne cherche donc pas un nouveau médicament, car cela demanderait de nombreuses années de recherche. En revanche, on tente de trouver les composants de médicaments existants qui réagissent au COVID-19. Si on parvient à les identifier, cela représentera un gain de temps considérable. Le coût de cette recherche est estimé à quelques dizaines de milliers d’euros, mais c’est un chiffre dérisoire en comparaison de ce que cela coûterait si l’on avait dû entamer les recherches à partir de zéro.

Les scientifiques du monde entier sont en ce moment en quête d’un remède contre le coronavirus. C’est également le cas à l’Institut Rega où une équipe de chercheurs teste depuis plusieurs semaines déjà des vaccins contre le coronavirus sur des animaux.

En collaboration avec le monde de l’entreprise

L’Institut Rega a été fondé en 1954 par Piet De Somer, plus tard devenu le recteur de la KU Leuven. Il a ainsi nommé ce centre de recherches en hommage à Josephus Rega, un professeur de médecine louvaniste du XVIIIe siècle. Après des études de médecine dans les années 1940, De Somer a rejoint une petite entreprise à Genval, dans le Brabant wallon, où il s’est consacré à la production de pénicilline. Cette entreprise, Recherche et Industrie Thérapeutiques ou R.I.T., est devenue un acteur clé. Au début des années 1950, De Somer est retourné à l’université et, avec l’argent du R.I.T., a fondé l’Institut Rega, une collaboration entre les facultés de médecine et de pharmacologie.

Dès le début, l’Institut Rega a travaillé en étroite collaboration avec le monde de l’entreprise. Il a également été l’une des premières institutions universitaires flamandes à produire des spin-offs. La question s’est alors posée de savoir à qui devaient revenir les bénéfices des brevets.

La collaboration avec le monde de l’entreprise n’a pas toujours été un long fleuve tranquille. Lorsque l’entreprise R.I.T. s’est retrouvée entre les mains de l’américain Smith Kline Corporation (aujourd’hui GlaxoSmithKline) en 1968, leur coopération s’est mise à battre de l’aile, car l’entreprise s’est mêlée de certains projets de recherche. De Somer a ensuite veillé à ce que l’institut puisse également compter sur le soutien du gouvernement, tout en continuant à travailler en étroite collaboration avec des entreprises.

À la recherche de nouveaux médicaments antiviraux

L’Institut Rega a rapidement connu le succès, en développant le vaccin contre la polio. Grâce au travail de Piet De Somer, la Belgique est devenue le premier pays au monde à éradiquer cette maladie.

Dans les années 1980, des recherches ont été menées sur des médicaments antiviraux, notamment contre l’herpès et le VIH. Elles ont conduit au développement d’inhibiteurs du VIH tels que le puissant Tenofovir, utilisé dans le monde entier. La licence de ce médicament a été vendue à l’entreprise biopharmaceutique américaine Gilead Sciences, qui en a poursuivi la mise au point et la commercialisation, en échange de royalties reversées à la KU Leuven. Les recettes ont notamment permis à l’Institut Rega de s’installer en 2017 dans un bâtiment neuf, contenant le fameux laboratoire entièrement automatisé où sont menées les recherches subventionnées par Bill Gates.

En 2004, les virologues de l’Institut Rega ont découvert que la chloroquine, un médicament précédemment administré dans le monde entier contre le paludisme, agissait également contre les coronavirus. Le professeur Marc Van Ranst a étudié la réaction de la chloroquine dans des cultures cellulaires infectées par le virus du SRAS, et les résultats se sont avérés encourageants.

Aujourd’hui, des chercheurs chinois de l’université de Wuhan, ville dans laquelle la pandémie de COVID-19 a débuté, ainsi que le professeur de microbiologie Didier Raoult à Marseille, ont repris ces recherches. Ils ont également découvert que la chloroquine inhibe la croissance du coronavirus. En attendant de trouver un véritable remède contre le COVID-19, on a aujourd’hui recours à la chloroquine.

Marc Van Ranst est devenu une véritable figure médiatique en Flandre. En 2007, le ministre belge de la Santé l’a nommé président du Commissariat interministériel Influenza, un comité scientifique chargé de préparer le pays à une éventuelle pandémie de grippe et d’élaborer des plans d’urgence. Le professeur Van Ranst est présent quotidiennement dans les médias flamands depuis quelques semaines. Les experts de l’Institut Rega, ainsi que de nombreux autres chercheurs, jouent un rôle public crucial dans cette crise sanitaire. Ils sont en effet la boussole qui guide les politiciens.

Dirk

Dirk Van Assche

ancien rédacteur en chef adjoint de Ons Erfdeel vzw

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