Le paysage flamand, au XVIe siècle, se lit, se voit, se vit comme une fable. Les agencements naturels accueillent de nombreux accidents, des péripéties parfois extravagantes, qui ouvrent la voie à la représentation picturale de révélations diaboliques par le rapprochement de scènes imprévisibles. Dans le mélange des formes et des ordres de l’univers qu’autorise la vision fantastique du monde, l’art engendre des associations d’idées dont le contenu énigmatique reste à défricher. Derrière le réalisme de la nature surgit une image double qui fait entendre autre chose de ce qui est dit, autre chose de ce qui est vu. Face aux paysages peints, le spectateur, dans un investissement physique et mental, doit trouver sa place exacte pour gagner la révélation d’un nouveau paysage dans le paysage. Nos yeux sont tout naturellement fascinés par une peinture de Lucas van Valckenborgh (vers 1535-1597).
Depuis son entrée au musée des Beaux-Arts de Lille, le tableau La Prédication de saint Jean-Baptiste (vers 1566?) a bénéficié de nombreuses attributions, ce qui en dénote la grande richesse stylistique. Les historiens d’aujourd’hui le disent même moderne, ce qui signifie en rupture avec la tradition. Ils privilégient de ce fait l’attribution la plus tardive dans le siècle. Cependant, la richesse d’écriture dont il fait preuve est bien le fruit d’une longue tradition toujours présente dans l’image. L’artiste y fait la démonstration d’une volonté de permanence comme d’actualité qui le libère des travers stylistiques et des procédés de composition.